Brésil x Green - Notre maison brûle !

 

Prenant une amplitude significative, les méga-feux de forêts au Brésil ravagent le cœur même de l’Amazonie. Intensifiés par le réchauffement climatique, ils résultent autant des fronts pionniers que de la politique du président Bolsonaro. Ainsi, la pression internationale doit s’accroître pour pousser Bolsonaro à préserver l’Amazonie brésilienne.

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Prenant une amplitude significative, les méga-feux de forêts au Brésil ravagent le cœur même de l’Amazonie.

  • Située au cœur de l’Amérique latine, l’Amazonie est fondamentale pour la viabilité de la planète. Il s’agit d’une région vaste qui est étendue sur le territoire de 9 pays, du Venezuela à la Bolivie et de l’Équateur au Brésil. Toutefois, plus de 40% de sa surface se trouvent sur le territoire brésilien. Selon l’organisation non-gouvernementale WWF, l’Amazonie abrite plus de 10% de la biodiversité mondiale tandis qu’elle participe aussi à la régulation du climat. C’est ce double rôle environnemental, pour la biodiversité et pour le climat, qui lui donne une importance décisive pour la viabilité de la planète.

  • Or, depuis le début de l’année 2019, les feux de forêts se sont multipliés avec une envergure préoccupante notamment en Amazonie brésilienne. L’épisode le plus visible et médiatisé s’est déroulé pendant la saison sèche à la fin du mois d’août. Tous les États brésiliens de la région ont été touchés par les 75 000 départs de feux dénombrés par l’institut de recherche brésilien INPE jusqu’à fin août 2019. Ces feux de forêts ont une ampleur si considérable qu’une philosophe française, Joëlle Zask, autrice de Quand la forêt brûle, les appelle « méga-feux » et pense qu’ils se distinguent par « une violence, une intensité, une étendue et une rapidité de passage extrêmement supérieures à la normale ».

Intensifiés par le réchauffement climatique, ils résultent autant des fronts pionniers que de la politique du président Bolsonaro.

  • Dans le monde entier, le réchauffement climatique engendre un cercle vicieux où les méga-feux de forêts sont appelés à se généraliser. Plus le climat tend à se réchauffer, plus les départs de feux sont probables (qu’ils soient d’origine accidentelle ou intentionnelle). Or, plus les méga-feux s’étendent, plus le CO2 stocké dans la forêt est relâché dans l’atmosphère. Comme le CO2 est un gaz à effet de serre causant le réchauffement climatique, un authentique cercle vicieux aggrave la situation initiale. De l’Australie aux États-Unis, de la Russie au Brésil, bien des territoires connaissent le risque d’être ravagés par les feux de forêts.  

  • Dans le cas spécifique du Brésil, les fronts pionniers des fazendeiros sont une cause majeure de déforestation et d’incendies. Les fazendeiros sont un groupe social influent qui est constitué des grands propriétaires terriens et d’exploitants agricoles. S’ils ont joué un rôle décisif dans le développement du Brésil, ils veulent aussi accaparer de l’espace utile afin de développer leurs activités d’élevage (bœuf) et d’agriculture (soja). Les cartes des feux de forêt recoupent les bordures de champs cultivés et les aires de reproduction des troupeaux. Selon l’enseignant en classes préparatoires Hugo Billard, les fazendeiros sont un lobby puissant au Brésil puisque l’agro-négoce pèse 20% du PIB du pays.

  • La politique du président Bolsonaro aggrave les destructions environnementales tant elle bride les pouvoirs des organismes de protection de l’environnement. En octobre 2018, avant même sa prise de fonction, Jair Bolsonaro avait annoncé l’absorption du ministère de l’environnement par le ministère de l’agriculture. Comme ce dernier est plus favorable à l’agro-négoce, la croissance d’une agriculture productiviste, au détriment des forêts, risque de primer dans les choix du gouvernement. Depuis, le président brésilien a aussi miné le pouvoir de sanction des administrations engagées dans la défense de l’environnement. Il fait en sorte d’entraver l’action des gendarmes écologiques comme l’IBAMA ou l’ICMBio.

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Ainsi, la pression internationale doit s’accroître pour pousser Bolsonaro à préserver l’Amazonie brésilienne.

  • Les destructions environnementales de Bolsonaro suscitent une contestation intérieure croissante. Emblématique de la cause, le chef indien Raoni Metuktire porte le combat des peuples indigènes. Il s’agit d’un vénérable chef indigène âgé de près de 90 ans qui multiplie les prises de position publiques pour la survie de l’Amazonie. En outre, les activistes environnementaux du Brésil, eux, se fondent sur la Constitution de 1988. Ils tirent parti d’une tradition juridique favorable en droit de l’environnement pour exiger la sauvegarde de l’Amazonie. Dans son article 285, la Constitution brésilienne désigne l’Amazonie comme un « bien commun à l’usage du peuple » ce qui promet des batailles juridiques contre ceux qui s’y attaquent.

  • Mais la pression internationale reste indispensable pour le faire plier dans l’intérêt des biens publics mondiaux dans l’Amazonie. Les pays européens auraient beaucoup de moyens d’agir pour contrecarrer le soutien politique à l’agro-négoce au Brésil. Par exemple, au regard de l’ampleur de la déforestation, des pays impliqués comme l’Allemagne et la Norvège gèlent 65 M€ de subventions au fonds de protection de la forêt. Ces démarches peuvent apparaître appréciables même si elles restent largement insuffisantes. Plusieurs autres leviers de pouvoir géopolitique restent entre les mains des pays européens : augmenter la pression diplomatique, conditionner l’aide au développement et refuser les accords de libre-échange avec le MERCOSUR sont autant de pistes à considérer avec la plus grande attention.

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Source image : Ouest France

Source carte : Courrier International

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