Chine x Futur – Vers l’hégémonie de la Chine en 2049 avec 10 priorités stratégiques

13/11/2022

Le XXe Congrès national du Parti Communiste Chinois (PCC) s’est achevé le 22 octobre 2022. Il consacre les ambitions mondiales et les moyens significatifs de Xi Jinping, secrétaire général du PCC et président de la République populaire de Chine (RPC). Dans ce discours dense et complexe, Xi Jinping dessine les voies d’une montée en puissance de la Chine au XXIe siècle pour atteindre l’hégémonie en 2049. L’équipe de NeoGeopo se propose de synthétiser ce discours et d’analyser sa portée structurante avec les 10 priorités stratégiques du gouvernement :

• Affermir l’hégémonie de Xi Jinping sur la Chine actuelle

• Légitimer l'appareil sécuritaire du PCC

• Construire une armée d’envergure mondiale

• Unifier le territoire dans toutes ses composantes

• Préserver la cohésion nationale de la population

• Renforcer le pouvoir de l’État sur la vie politique

• Impulser une nouvelle ère pour le socialisme à la chinoise

• Augmenter l’investissement dans l’innovation et le capital humain

• Se confronter aux défis environnementaux

• Siniser l’ordre mondial

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1/ Affermir l’hégémonie de Xi Jinping sur la Chine actuelle 

• « À partir de ce jour, la tâche centrale du Parti communiste chinois sera de conduire le peuple chinois de tous les groupes ethniques dans un effort concerté pour réaliser l’objectif du deuxième centenaire de faire de la Chine un grand pays socialiste moderne à tous égards et de faire progresser le rajeunissement de la nation chinoise sur tous les fronts par une voie chinoise de modernisation ». 

• Le soutien de la direction générale du Parti et le maintien de l’autorité du Comité central renforcent le poids du PCC, garant de la modernisation du pays, de la stabilité politique et de la sécurité nationale. Marquant le centenaire de la création de la RPC, l’année 2049 est censée acter l’atteinte de la suprématie géopolitique et géoéconomique de la Chine.  

• Ce XXème congrès du PCC permet aussi à Xi Jinping de prolonger son mandat à vie tout en remodelant selon le Parti ses ambitions. Face aux médias nationaux, l’éviction forcée de Hu Jintao (ancien SG du PCC entre 2003 et 2013) témoigne de la volonté hégémonique de Xi Jinping.   

2/ Légitimer l'appareil sécuritaire du PCC 

• « Nous devons résolument adopter une approche holistique de la sécurité nationale et promouvoir la sécurité nationale dans tous les domaines et à toutes les étapes du travail du Parti et du pays ». 

• La République populaire de Chine (RPC) est gouvernée par un État-parti depuis sa fondation en 1949 par Mao Zedong. Sous la mainmise du PCC, elle adopte une posture d’extrême vigilance face à toute menace potentielle qui pourrait contester cette harmonie affichée entre le peuple et le parti unique. 

• Selon le PCC, il existe 5 poisons susceptibles de contester son autorité politique (Xinjiang, Tibet, Taïwan, mouvements démocrates et Falun Gong). Arguant de la sécurité publique et de la paix civile, Xi Jinping cherche à resserrer sa mainmise par un système de surveillance généralisé (reconnaissance faciale). En raison de la sensibilité et de l’opacité du sujet, le Parti (PCC) esquisse simplement les contours de ce projet « coordonné » et « multidimensionnel » qui vise à éduquer le peuple à la défense de la patrie.  

3/ Construire une armée d’envergure mondiale 

• « Atteindre les objectifs du centenaire de l’Armée populaire de libération en 2027 et élever plus rapidement les forces armées de notre peuple à un niveau de classe mondiale sont des tâches stratégiques pour construire un pays socialiste moderne à tous égards ». 

• Dans le contexte de la rivalité sino-américaine, la concurrence mondiale à tous les niveaux pousse la Chine à s’armer face aux nouveaux enjeux mondiaux tout en comblant ses faiblesses (Graham Allison, Destined for War, 2017). 

• La modernisation de l’armée passe par une amélioration de sa structure de gouvernance, une intensification des entraînements militaires en condition de combat et l’établissement d’un solide système de dissuasion stratégique. Une attention particulière est portée aux capacités navales de projection de puissance (3 porte-avions, 6 SNLE et la construction de l’équivalent de la marine française tous les 4 ans selon l’amiral Vandier, 2022).

4/ Unifier le territoire dans toutes ses composantes 

• « Réaliser la réunification complète de la Chine est, pour le Parti, une mission historique et un engagement inébranlable. » 

• Le président chinois entend exercer une emprise totale sur les territoires stratégiques à tous points de vue (économique, technologique, stratégique) tout en s’appuyant sur la diaspora (> 45 M de Chinois de l’étranger) 

• Xi Jinping poursuit sa dynamique d’unification territoriale de la Chine continentale (Tibet, Xinjiang) et des territoires connexes (espaces maritimes, Macao, Hong Kong, puis, Taïwan) dont plusieurs constituent des « dossiers vitaux et globaux » (Thomas Gomart, L’affolement du monde, 2019) 

5/ Préserver la cohésion nationale de la population 

• « Nous devons renforcer la cohésion de la nation chinoise et l’attrait de la culture chinoise ». 

• Les crispations populaires face à la stratégie zéro covid, appliquée depuis 2020, ainsi que la restriction progressive de l’autonomie de Hong Kong (2020) renforcent les lignes de fracture entre la population et le gouvernement. 

• Selon Xi Jinping, plusieurs clefs de la cohésion nationale doivent être mobilisées avec plus de vigueur : l’étude approfondie de la nouvelle théorie du PCC, l’enrichissement de la vie culturelle du peuple et une croissance économique plus équitable (campagne anti-corruption de 2013). 

6/ Renforcer le pouvoir de l’État sur la vie politique 

• « Tout le pouvoir de l’État en Chine appartient au peuple ». 

•  Le président Xi Jinping cherche à légitimer par la volonté populaire l'omniprésence du PCC dans tous les domaines régaliens. La concertation populaire doit être maîtrisée sur toute la chaîne de participation pour déployer une « dictature démocratique populaire ». 

• Xi Jinping appelle au renforcement des institutions politiques et au développement de la démocratie au niveau primaire afin de garantir la démocratie populaire intégrale (notion de démocratie populaire chinoise sur l’ensemble du processus). 

7/ Impulser une nouvelle ère pour le socialisme à la chinoise 

• « Construire la Chine en un grand pays socialiste moderne, prospère, fort, démocratique, culturellement avancé, harmonieux et beau de 2035 jusqu’au milieu de ce siècle ». 

• Plus grande économie socialiste au monde, la Chine entend toujours rivaliser avec les plus puissantes économies capitalistes, dont les États-Unis d’Amérique. Xi Jinping se donne pour mission « la disparition ultime du capitalisme et la victoire finale du socialisme » (Alice Ekman, Rouge vif, 2020). 

• Pour moderniser le socialisme chinois, Xi Jinping vise l'augmentation substantielle du PIB par habitant chinois (> 12 500$), la modernisation de l’économie comme de la gouvernance, le renforcement du soft power (éducation, culture, sport, santé, science) ainsi que le respect de l’environnement. 

8/ Augmenter l’investissement dans l’innovation et le capital humain 

• « L’éducation, la science et la technologie, et les ressources humaines sont les piliers fondamentaux et stratégiques de la construction d’un pays socialiste moderne à tous égards ». 

• Xi Jinping souhaite adapter l’éducation aux attentes de la population ; il vise à améliorer les systèmes d’innovation scientifique et technologique par une réforme structurelle et le renforcement des investissements.  

• Il met en œuvre la stratégie de développement d’une main d’œuvre adaptable à forte compétence et il accélère le déploiement de la stratégie innovation (big data et IA).  

9/ Se confronter aux défis environnementaux 

• « Respecter, s’adapter et protéger la nature est essentiel pour faire de la Chine un pays socialiste moderne à tous égards. » 

• La Chine a connu une période de croissance débridée qui la conduit aujourd’hui se questionner sur la soutenabilité de son modèle économique. Premier émetteur mondial de gaz à effet de serre (GES), avec le charbon qui représente près de 65% de son mix énergétique, la Chine affiche viser la neutralité carbone à l’horizon 2060. 

• Grâce à l’approche dite « Belle Chine », Pékin s’engage pour la conservation du patrimoine vivant, la protection de la biodiversité et de la qualité de vie. Une course contre le temps apparaît engagée par le pouvoir pour transformer le mode de consommation de près d’1,4 milliard de Chinois. Cependant, Xi Jinping fait preuve d’ambivalence sur ces questions : il est absent de la COP 27 à Charm El-Cheikh de novembre 2022. 

10/ Siniser l’ordre mondial 

• « Le monde est une fois de plus arrivé à un carrefour de l’histoire, et son cours futur sera décidé par tous les peuples du monde. »  

• Dans une posture constante depuis la période de la Chine tiers-mondiste (années 1950), la diplomatie chinoise distille ses lignes directrices en faveur de la coexistence pacifique, du développement constant et la non-ingérence politique.  

• La Chine de Xi Jinping entend bâtir un nouvel ordre sino-centré qui promeuve ses intérêts et ses valeurs. S’il enregistre des difficultés et contestations croissantes, le projet BRI, initié en 2013, a pour ambition de redéfinir la carte des échanges mondialisés. L’Europe apparaît au centre de cet effort de façonnement géopolitique avec des succès contrastés (Godement et Vasselier, La Chine à nos portes, 2018 ; l’exemple de la prise de participation de COSCO pour 24,9% dans le port de Hambourg en 2022) 

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Source texte : NeoGeopo / Matthieu Alfré et Adrien Gredy et Axel Riondet

Source image : Les Echos

Source carte : NeoGeopo / Apolline B. [rendons à Apo ce qui est à Apo]

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